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 ✜ RESTLESS (Ariel)

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Ariel Oleander

Ariel Oleander

admin en or
▽ messages : 111
▽ inscription : 13/01/2013

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MessageSujet: ✜ RESTLESS (Ariel)   ✜ RESTLESS (Ariel) EmptyMer 20 Fév - 19:12


Ariel Oleander
But I'm coming alive
I'm happening now
▾ Nom : Oleander, un nom qu'il n'a jamais vraiment assumé. Il faut dire que son véritable nom, il ne le connaît même pas... ▾ Prénom(s) : Ariel, comme la petite sirène, même s'il est loin d'en avoir la tignasse rouge feu et la queue de poisson ▾ Surnom : "gamin", "chien galeux", "hé toi là bas", "sale voleur", ça dépend des circonstances et des gens qui lui parlent ▾ Profession : voleur à la sauvette, il vit de ci de là. Profession légale ? Il n'en a pas, et puis ce n'est pas comme s'il y avait beaucoup de travail à offrir dans les quartiers pauvres. Il lui arrive de faire quelques travaux de menuiserie ou de chasse à la vermine parfois, mais les offres se font de plus en plus rares. ▾ Age : 24 ans ▾ Date et lieu de naissance : Bersinar, an 608 du troisième âge. Son anniversaire plus ou moins officiel est le 4ème jour du 10ème décan ▾ Race : humain ▾ Statut social : célibataire, c'est largement suffisant ▾ Orientation sexuelle : personne ne lui a jamais posé la question et, à vrai dire, il ne se l'est jamais posée non plus ▾ Signes particuliers : une cicatrice plutôt longue qui court le long de son flanc droit, une barbe de trois jours et un regard transperçant, c'est suffisant ? Sinon, il est particulièrement agile de ses mains, et court très vite -la moindre des choses, pour un voleur ▾ Traits de caractère : énergique, impatient, intuitif, discret dans ses affaires, un peu trop sociable, confiant, immature, cruellement créatif, envahissant, attentionné avec de rares personnes, borné, trop expressif pour son bien, influençable, charmeur par moments, brouillon, a un sens de l'humour particulier ▾ Famille : Ariel n'a jamais connu sa véritable famille. Elevé depuis sa naissance par Nan', sa mère de substitution, il n'a jamais cherché à savoir d'où il venait, probablement effrayé par ce qu'il aurait pu trouver. ▾ Groupe : les bas-fonds ftw ▾ Crédits : avatar KIDD, bannières Tumblr, citation Everything Everything

▾ Bersinar, oui, mais qu'en est-il ? Ariel est un produit directement issu des bas-fonds de Bersinar. D'aussi loin qu'il se souvienne, il y a toujours vécu et, honnêtement, il ne s'imaginerait même pas vivre ailleurs. A ses yeux, les bas-fonds sont sa seule maison, le seul véritable endroit où il puisse se sentir chez lui, auprès des siens. Lorsqu'il se promène à droite à gauche, il ne peut qu'entendre des bribes de conversations médisant ce quartier d'où il vient et, s'il sait la plupart du temps se contenir, il arrive des fois où il n'arrive pas à totalement se contrôler. La notion de famille est bien différente chez les plus ancrés des quartiers pauvres, et encore plus pour lui. A ses yeux, tous les habitants des bas-fonds appartiennent de près ou de loin à ce qu'il pourrait appeler "sa famille", et les quartiers délabrés ne sont que leur pauvre maison. Voilà la façon dont il envisage le quartier, la ville. Voilà son Bersinar.

▾ D'ailleurs, entre nous, qu'est-ce que vous pensez de l'Empire et des aristocrates qui sont arrivés avec lui ? Pour faire court et original, il y a du bon comme du mauvais, à cette prolifération d'aristos' et, tant qu'à faire, il préfère se pencher sur les bons côtés. Du jeu, du challenge, et de l'argent -voilà tout ce que lui apporte ces gens huppés qu'il ne côtoie que quelques minutes par jour, le temps de leur voler leur argent, généralement. Nouer des liens plus profonds avec ces vendus de l'Empire ? Très peu pour lui. Si leur arrivée a fait du bien à Bersinar, le fossé entre riches et pauvres n'a fait que grandir au fil du temps. Il n'est pas crétin -enfin pas autant-, et il n'est pas dupe. Bien campé sur ses deux jambes, il a conscience de la façon dont le voient, à tort ou à raison, tous ces bourges prétentieux. "Enfant du peuple", "garçon mal élevé", "saleté ambulante" sortent parfois de leurs bouches pincées lorsque leur route vient à croiser celle d'Ariel et, s'il leur répond la plupart du temps par un rire narquois, intérieurement cela ne fait que renforcer son aversion pour eux. Il les déteste, il les répugne mais puisqu'ils sont son meilleur gagne-pain, il ne peut s'empêcher de leur courir après.

▾ Et ce nouveau décret, alors ? Avouer que l'apparition soudaine de ce décret l'a choqué est le plus doux des euphémismes. Bersinar pourtant ouverte sur le monde, qui se ferme sur elle-même comme une huitre du jour au lendemain ? A ses yeux, tout ça pue l'arnaque à plein nez, pour rester poli. De là où il est, les magouilles des politiciens lui apparaissent un peu trop clairement, et il ne peut qu'en être dégoûté. Qui d'autres que les très aimés aristocrates pourront se payer des laisser-passer ? La milice pourra s'en donner à coeur joie, le jour où il faudra arrêter tous les hors-la-loi des bas-fonds. La vermine, comme ils disent -à croire qu'ils n'attendaient qu'une bonne raison pour lancer l'extermination. Il ne tenait pas particulièrement à voyager, du moins il ne s'était jamais posé la question jusque là, mais se faire arrêter à cause d'un bout de papier, hors de question. N'est pas né celui qui pourra mettre à sac les bas-fonds de Bersinar.


Ashes and dust all around me
Ariel - 10 ans

Une odeur de souffre, de poussière, des relents de pourriture, de moisi, de bois floqué, et d'obscurité. Voilà ce qu'étaient les bas-fonds, aux yeux de ceux qui n'y vivaient pas comme aux yeux de ceux qui y habitaient. Des endroits sombres, parfois inhospitaliers, dangereux, ou en tout cas relativement risqués pour qui ne avait pas où mettre les pieds. On y trouvait du mauvais, énormément même, entre tous les malfrats et les criminels qui en avaient fait leurs quartiers, entre tous les voleurs et les bandits, les escrocs et les malfaiteurs en tout genre - du mauvais, oui, mais du bon aussi. Là où le soleil savait passer, entre les multiples planches de bois qui recouvraient les toits délabrés, une fleur savait pousser, perdue dans cet univers trop sombre -enfin façon de parler. Des fleurs, il n'en avait pas beaucoup vues depuis sa naissance, pas dans ce coin de la ville en tout cas. Non, pour ça, il fallait plutôt remonter du côté du quartier Aigue-Marine, ou en tout cas s'éloigner suffisamment des débris qui jonchaient celui des Ruines Miroitantes, ce quartier désolé dans lequel il vivait depuis toujours. Pourquoi ce nom ? Il n'en avait aucune idée. A ses yeux, les ruines se révélaient plutôt être des habitations, les gravats des restes d'un passé injuste et la poussière l'espoir des habitants qui jonchait le sol. Les bas-fonds étaient son quotidien, au même titre que l'était le centre ville Améthyste pour bon nombre d'autres Bersinois. Il n'avait jamais connu le luxe d'un grand appartement, le confort d'une maison bordée de tentures et de coussins, la satisfaction de pouvoir se vanter de vivre dans le logement le plus en vogue du quartier mais, quelque part, ça ne lui avait jamais manqué -probablement parce qu'il se faisait une image très abstraite de tout cela. Comment peu-on manquer d'une chose que nous n'avions pas connue ? La simplicité de son quotidien lui suffisait amplement et, si un jour un homme devait se présenter à lui et l'arracher de son quartier bien-aimé, il lui rirait probablement au nez, avant de s'enfuir en courant. Aussi sales pouvaient-ils paraître de l'extérieur, les taudis demeuraient pour lui bien plus poétiques et riches de surprises que les nouveaux bâtiments brillants de mille feux qui fleurissaient dans le centre de la ville. Des idées bien tranchées concernant Bersinar ? Autant que peuvent l'être les pensées hasardeuses d'un gamin de dix ans. L'école et le savoir-vivre étaient des notions qui lui étaient entièrement étrangères, au même titre que la politique et bon nombre d'éléments aux noms aussi barbares que valeur commerciale, institution, ou même carpophobie. L'école avait beau être publique, à Bersinar, il était rare qu'elle accepte des enfants venant des bas-fonds de la ville, encore plus lorsqu'aucun parent légal ne pouvait se porter garant pour celui-ci. Finalement, s'il y avait bien une chose qui lui manquait, c'était celle-ci. Le réconfort de retrouver ses parents le soir, le simple soulagement de savoir qu'il était né de l'union de deux personnes qui s'étaient aimées, et non pas des cendres de la zone. Dix ans. Dix ans qu'il était né, et il n'avait aucune idée de qui pouvaient bien être ses géniteurs. Etaient-ils des habitants des bas-fonds, qui n'avaient pas eu les moyens de le garder auprès d'eux ? Ou alors de riches aristocrates qui s'étaient retrouvés dépassés par l'arrivée inopinée d'un bébé ? Si les scénarios étaient multiples, en choisir un revenait à condamner tous les autres, à quand bien même ceux-ci se révèleraient plus joyeux. Quitte à vivre en portant un nom qui n'était pas le sien, il préférait le faire en ignorant tout de ses racines dont il ne se sentait pas réellement proche. Ses parents n'avaient pas voulu de lui ? Tant mieux, il ne voulait pas d'eux non plus. Tout ce qu'il lui restait à faire, c'était continuer à grandir et à avancer fièrement, et à courir pour oublier cette vérité qui l'agressait lorsqu'il n'y pensait pas.

Depuis qu'il savait tenir sur ses deux jambes, il ne faisait que courir. Courir pour se sentir vibrer entre les ruelles escarpées des bas-fonds, courir pour sauter de part en part des toits en partie rongés par le temps, courir pour échapper à quelque main malintentionnée. Il n'avait fait que ça, courir, et, quelque part, il n'en demandait pas plus. Pas de cours cruellement ennuyeux auxquels participer, pas et surtout pas de comptes à rendre. Enfin presque pas. Dans son dos, il y avait toujours eu Nan' et, même si la journée il se plaisait à lui échapper et à explorer le dédale de ruelles sombres qui constituait son terrain de jeu, il revenait toujours vers elle, rarement à contre-coeur. Si la liberté avait un goût irrésistible, revenir sain et sauf "chez lui" et voir la douce femme attendre après lui avait une saveur tout aussi exquise. Nan', ce rocher, cette silhouette rassurante qui constituait le seul pilier familier dans ce monde d'aventures. Il n'y avait aucun lien de sang entre eux, et cela ne l'avait pas empêchée d'avoir toujours été là pour lui, et surtout d'avoir été là depuis sa naissance. Comment s'était-elle retrouvée à s'occuper d'un nourrisson comme lui ? A quoi bon chercher des réponses à des questions qu'il ne voulait pas se poser... Nan' était sa mère de substitution, cette nourrice qu'il chérissait autant qu'elle le chérissait, et il ne s'en portait que mieux. Inutile de chercher des gens dont il partagerait le même sang - sa véritable famille, c'était elle, et rien qu'elle. Nan' et ses histoires fantastiques, Nan' et ses tartes délicieuses, Nan' et ses morales qu'il évitait comme la peste. Dévalant l'une des longues et sinueuses ruelles sombres, il lui semblait encore entendre les paroles de sa nourrice, alors qu'il chapardait un des cookies qu'elle sortait du four. « Mon petit Ariel, si je t'attrape, je ferai une tourte avec tes mauvaises manières, et je t'obligerai à la cuisiner avec moi ! » Des éclats de rire, quelques pas pressés, et il était sorti de la maison. Ne jamais rester dans quelque chose de trop sérieux, toujours finir avec une petite touche de joie ou d'optimisme, voilà comment il envisageait déjà sa vie. Si les bas-fonds forçaient bien des gens à mûrir trop vite pour survivre dans ce monde, il en était bien loin, préférant se complaire dans une innocence jonchée de naïveté. La vie était déjà suffisamment triste comme ça dans les bas-fonds, pourquoi se complaire à l'assombrir encore plus et à quitter la fraîcheur de la jeunesse ? Il n'avait que dix ans. Et, à dix ans, on ne pense pas à ces choses là. On ne cherche pas à voir le mal dans le monde qui nous entoure, on se plaît plutôt à y trouver tout ce qu'il y a de bon. On cherche des aventures incroyables, on se raconte des histoires fantastiques, on court, on roule, on vole. On s'invente chevalier, chercheur de trésors, explorateurs perdu dans la jungle, on estime que ce passant au loin est un animal féroce, mais on est bien loin de l'imaginer comme le véritable monstre qu'il est. Ses pas ralentirent, alors que sa silhouette frêle se rapprochait de l'homme qui bouchait peut-être sans le vouloir le bout de la ruelle. Un coup d'oeil rapide de droite et de gauche avait suffi à lui montrer que, malgré sa maigreur, il n'arriverait pas à se frayer un chemin comme il le souhaitait. Escalader les murs pour longer les toits ? Manque de chance, il n'y avait aucune prise à portée de main. Et absolument hors de question de rebrousser chemin. Ariel le grand explorateur ne retourne jamais sur ses pas, ô grand jamais. Au lieu de ça, il se laissa ralentir, finissant par parcourir à pas rapides les quelques mètres qui le séparaient de ce monstrueux et indicible tigre des sables. Sourcils froncés au dessus de son regard de glace, le grand Ariel pesta à voix basse, maudissant son épée oubliée avant de partir en vadrouille. Arriverait-il à vaincre cet ennemi redoutable ? Rien n'était moins sûr et, pourtant, il ne se laissa pas distraire par la carcasse gigantesque de la bête, la hélant avec un « Hé, je veux passer » qu'il estimait tranchant. Devant lui, l'homme se retourna, jaugeant la carrure rachitique du gamin d'un air presque mauvais, un rictus se dessinant sur son visage caché par l'ombre des maisonnées. « Ah ouais ? Et tu me donnes quoi pour ça, gamin ? » Mains sur les hanches, Ariel gonfla ses joues, relevant le menton avec un air de défi. Avoir peur d'un inconnu pareil ? Jamais, ce n'était pas de son rang. Il n'était pas un grand aventurier pour rien et, danger ou pas, il n'allait pas se laisser démonter pour si peu. Il avait connu bien pire après tout, ce n'était pas ce grand bêta qui allait l'arrêter -même si, secrètement, il espérait que tout se passerait aussi bien que dans les histoires qu'il s'inventait le soir. La réalité avait parfois une saveur bien différente de celle de ses rêves mais ça, il était bien loin de le savoir. « Je n'ai rien à t'offrir. Laisse-moi passer, manant ! » Des expressions d'un autre âge, d'un autre temps, mais qui rendaient cruellement bien dans les contes que Nan' lui racontait -et qui n'étaient pas mal non plus à voix haute, maintenant qu'il s'entendait. Sa phrase fut néanmoins accueillie par un grand silence et, plusieurs secondes plus tard, l'inconnu se décolla enfin du baril qu'il était en train de vider pour se tourner entièrement vers lui, sourire goguenard accroché aux lèvres. Dans l'ombre, Ariel jura voir la tranche d'une lame briller et, s'il n'en dit rien, son sang ne fit qu'un tour. Silencieux, il resta de marbre, ne pensant même pas à ses bras et ses jambes qui commençaient à trembler d'eux-même. Un rire gras, suintant dans le silence soudain trop lourd, et son adversaire fit lentement un pas vers lui. « Alors gamin ? T'as perdu ta langue ? »Un pas, puis deux, puis trois. S'enfuir ? Il n'y arriverait pas. Malgré leurs tremblements, ses pieds étaient comme collés au sol et, il avait beau lutter pour les faire bouger, rien n'y faisait. Ne lui restait plus qu'à prier, et à redouter l'inévitable. Un regard en arrière, à droite à gauche, même vers le ciel, mais aucune aide ne semblait prête à lui parvenir. Indélicat, son opposant ne manqua pas de le remarquer et, riant sourdement, il continua son épopée vers le gamin, appréciant son petit bout de chemin en prenant tout son temps. « On dirait que t'attends quelque chose... Tu crois quand même pas que quelqu'un va venir te sauver dans ce coin paumé des taudis ? » Les yeux rivés sur la lame, il la regardait se rapprocher lentement, lentement, s'empêchant de ciller pour ne pas la quitter. Glissera ? Glissera pas ? « Et toi tu crois quand même pas que tu vas faire la peau à un gamin pareil ? » Un coup, que personne n'avait vu venir. En une fraction de seconde, tout s'était écroulé autour de lui, et la voix grave du nouvel arrivant résonnait dans la ruelle. « Casse-toi gamin, et arrête de traîner seul comme un crétin ! » Il aperçut à peine son visage, déjà tourné vers l'homme qu'il venait de frapper, et qu'il ruait de nouveaux coups. Interdit, Ariel hésita à peine, et s'élança à toute vitesse pour les dépasser, se ruant vers des ruelles plus ouvertes, bien loin du carnage auquel il venait d'échapper. Il n'avait jamais couru aussi vite de toute sa vie.



I never done good things
Ariel & Ciah - 15 ans

« Et où est-ce que tu comptes aller comme ça ? » Dans son dos, la voix féminine s'éleva et, faisant comme si ces quelques mots n'étaient pas adressés à lui -alors qu'il savait pertinemment le contraire-, il s'éloigna discrètement d'un pas ou deux, glissant entre deux potentiels acheteurs au regard avide de nouveauté. D'ordinaire, il était suffisamment discret pour que personne ne remarque sa présence, ou plutôt l'absence d'un ou deux objets sur l'étalage après son passage. Il fallait croire que ce n'était pas son jour, où qu'il s'était lamentablement fait prendre à cause de cet abruti qui lui avait donné un coup d'épaule, et qui avait bien failli le faire tomber sur le stand de la demoiselle. S'il en avait justement profité pour chaparder son dû, son geste n'avait pas du passer aussi inaperçu qu'il l'avait souhaité, tant pis pour lui -et surtout pour elle. Ce n'était pas la première fois qu'il volait après tout, et sûrement pas la dernière. Voleur aux doigts agiles, il vivait de ses prises, au même titre que les pêcheurs ou les éleveurs -les animaux en moins, évidemment. Pour autant, il n'estimait pas faire partie de toute cette pègre faite de criminels en tout genre, tous ces êtres mauvais qui dérobaient pour le plaisir de tromper les autres. Non, à ses yeux, il était plutôt celui qui volait aux riches pour donner aux pauvres, ou en tout cas qui volait ce qui lui était nécessaire pour vivre, mais qu'il ne pouvait se payer. Tout avait commencé avec une pomme. Une pauvre pomme sur l'étal d'un marchand occupé à trier ses caissons. Et puis avaient suivi quelques légumes, des sacs en toile, un ou deux couteaux bien affûtés, des assiettes, du tissu, et quelques dizaines d'autres choses, tous horizons confondus. Depuis combien d'années déjà ? Trop pour qu'il continue encore de les continuer. Vital. C'était le seul mot qui lui venait à l'esprit, lorsqu'il parait en chasse, en quête de quelque objet à dérober. Le vol n'était pas réellement sa vie, mais il avait besoin de voler pour vivre. Ce n'était pas par gaieté de coeur qu'il le faisait, même si depuis quelques temps il commençait à y trouver une certaine satisfaction. A quoi bon chercher à vivre autrement, à présent ? Ses capacités étaient assez réduites, et les offres d'emploi encore plus. Oh, malgré son éducation plutôt hasardeuse, il était loin d'être le plus crétin des abrutis, mais allez expliquer ça à un employer des beaux quartiers -ce dernier ne fera que vous rire au nez. Il était plutôt mal vu d'embaucher des gamins d'à peine seize ans, encore plus quand ceux-là venaient des bas-fonds de la ville. Tous des voleurs ? Il fallait croire que le reste de Bersinar n'avait pas totalement tort à ce sujet, même s'ils ignoraient que parmi ces pègres demeuraient quelques âmes qui se repentaient de leurs actes en glissant quelques pièces d'or sur les étals des gens volés. Ariel faisait parti de ceux-là, même si l'idée était loin de venir de lui. C'était Nan' qui lui avait dit de faire ça, le jour où il était revenu chez eux avec des légumes qu'il n'aurait jamais pu acheter. Malgré les quelques réprimandes qui avaient fusé dans l'air, Nan' avait été touché par ce geste, et encore plus par la détresse dont ils étaient victime, pour que le petit se mette en tête de dérober de quoi survivre. Loin d'être capable de travailler à temps plein, elle gardait des enfants quelques heures par semaine, bien souvent en échange de services rendus, mais pas d'argent. L'argent circulait bien rarement entre les mains des habitants dans ce coin-là et, plutôt que d'acheter les services des autres, c'était plutôt un système d'entraide qui avait pris le pas, chez la population encore vierge de tout délit. Comment accepter alors que le petit dévale une pente dont elle tentait de l'éloigner à tout prix ? « Demain, dépose discrètement cette pièce sur son étal. Il ne doit pas te voir, mais assure toi que c'est bien lui qui récupère cet argent, tu m'as comprise ? » Si ça n'avait pas été leurs dernières économies, ça n'en était pas loin, et Ariel eut bien du mal à comprendre ce geste. Pourtant, il l'avait fait. Le lendemain, il avait déposé cette pièce, sur ce fameux étal. Et, depuis ce jour, il finissait toujours par rembourser la plupart de ses "achats", parfois longtemps après les avoir chapardés. Pourquoi alors continuer à agir de la sorte, alors qu'il pourrait probablement renverser la tendance ? Parce qu'il était ainsi. Et que, même avec toute la volonté du monde, il était toujours difficile d'agir à contre-nature.
« Ne crois pas t'échapper comme ça, je sais très bien que tu m'as entendue. » Cette fois-ci, la petite voix fluette était proche, bien trop proche à son goût, et il n'eut même pas besoin de se retourner pour sentir une légère pression sur son épaule. Pris la main dans le sac. Il avait été négligent, trop négligent mais, vendu pour vendu, il avait peut-être encore une chance de sauver sa mise. Mal pour un bien -ou bien pour un mal, il n'arrivait toujours pas distinguer les deux expressions-, il était tombé sur la fille des marchands, et non pas le père de famille qui dirigeait d'ordinaire le stand -ce qui, avouons-le, aurait été bien plus regrettable. Il n'avait jamais vraiment observé la gamine, qui devait probablement avoir son âge, mais quitte à y aller franchement, peut-être pourrait-il s'en sortir sans trop de mal avec deux ou trois belles paroles. Après tout, les filles de son âge étaient avides d'aventures et d'un petit frisson, non ? Il pouvait bien essayer de lui offrir ça, avec un peu de chance, ça suffirait amplement à lui faire oublier ce petit méfait. Inspirant légèrement, sa prise toujours secrètement enfermée dans sa main, il se tourna vers la demoiselle, essayant de peindre une expression des plus surprises sur son visage. « Désolé, c'est moi que tu appelais ? Je ne crois pas avoir le plaisir de te connaître. » Et puis un sourire. Des formules toutes faites, préconçu pour les gens qui manqueraient d'imagination, comme pour lui qui préférait de loin le langage plus fleuri et gratiné de son quartier. Règle N°1 : ne jamais être trop familier lorsque tu sors des bas-fonds, au risque d'être immédiatement reconnu pour ce que tu es - ce qui, lorsque tu cherches à passer inaperçu, te porte un peu trop préjudice. Ces quelques mots pourtant passe partout, ces formules de dragues à deux pièces, il les avait entendus au détour de quelques rues, au milieu d'un quelconque quartier, il ne savait plus trop lequel. Vu la réaction de la jeune femme à qui ils étaient destinés, Ariel avait pu juger de leur efficacité, et il avait patiemment attendu le moment de tenter à son tour d'étonner une demoiselle. Aujourd'hui semblait être l'occasion parfaite mais, à en juger par l'air qu'affichait la fille qui lui faisait face, il fallait croire qu'il était tombé sur la mauvaise pioche. « Pas de ça avec moi, je sais que tu as volé quelque chose sur notre stand. » Sans sourciller, Ariel la fixa plus longuement, laissant malgré lui son sourire s'agrandir. Elle avait beau être perspicace ou observatrice, il n'allait pas lui faire le plaisir de se rendre aussi facilement, loin de là. Il haussa distraitement les épaules, avant de reprendre posément la parole. « Je ne vois pas de quoi tu parles, tu dois de tromper de gars. » Chassez le naturel, il revient au galop. A quand bien même, ce n'était qu'une gamine également, et fille de marchands de surcroît. Elle ne descendait pas de la grande bourgeoisie gratinée, et grand bien lui en faisait. Malgré le rôle indélicat qu'elle occupait à ses yeux, Ariel devait bien avouer qu'elle n'en démordait pas et, dans d'autres circonstances, après une autre rencontre, il aurait probablement été ravi de s'en faire une amie, la seule qui ne venait pas des bas-fonds. Malheureusement ou heureusement pour elle, le sort en avait décidé autrement. Devant lui, elle croisa les bras, arqua un sourcil tout en fixant la main toujours fermée d'Ariel, mettant un long moment avant de remonter vers son visage. « Vraiment ? Pourtant il y a encore l'étiquette dessus. » Fronçant à son tour les sourcils, Ariel ne prit même pas le temps de réfléchir à ce qu'elle venait de lui dire, et jeta instinctivement un coup d'oeil vers sa main, cherchant activement l'étiquette des yeux - un geste qu'il regretta amèrement lorsqu'il comprit la seconde d'après qu'il venait de se vendre tout seul. Passant le bout de sa langue sur ses lèvres, il resta quelques brefs instants à fixer les pavés au sol, tentant mentalement de se frayer un chemin vers un échappatoire qui se faisait de plus en plus obscur. Qu'il est brave, ce voleur, même pas fichu de se sortir d'une situation pareille ! Qu'il est beau, ce crétin, pour s'être fait prendre à une farce aussi simple ! Il pouvait se traiter intérieurement de tous les noms, se gifler autant de fois qu'il le pouvait, les faits restaient les mêmes et, gueule d'ange ou pas, il finirait pas être offert en pâture à la milice de la ville. Il s'était toujours dit que si un jour il devait finir en prison, ce serait pour le plus gros casse de toute la ville, quelque chose de tellement énorme qu'on parlerait encore de lui après bien des années. Alors hors de question de finir derrière les barreaux, pas pour un petit truc comme ça. Il finit par relever doucement la tête vers la jeune fille, visiblement mal à l'aise mais tentant d'afficher un sourire -plus ou moins désolé-, et esquissa un pas en arrière. « Ecoute, c'est vraiment pas ce que tu crois. Alors si tu pouvais éviter de me dénoncer, ce serait su-. » « Montre moi ce que c'est. » Elle n'allait pas lâcher l'affaire, vraiment ? D'instinct, il recula sa main, éloignant sa prise de la demoiselle alors que celle-ci se rapprochait. Elle n'avait visiblement pas peur, et sa force de caractère amusait particulièrement Ariel. Même si la situation n'avait rien de cocasse, cela lui suffisait à trouver un peu de bonheur et, autant avouer les choses comme elles étaient, c'était beaucoup plus agréable de tenter d'échapper aux filets d'une demoiselle que d'un vendeur tout en gras et en muscles. Son sourire toujours plus grand, il continua sa danse, la gamine se jetant sur lui pour l'empêcher de s'échapper. Droite, gauche, un pas en avant, deux en arrière. Je suis là, je ne suis pas là, tu penses le voir, mais il n'est pas là. Il était doué à ce petit jeu, bien plus doué que quelques années avant, et rares étaient les personnes qui pouvaient se vanter de pouvoir l'attraper lorsqu'il se mettait à courir. Seulement, la fuite n'était pas une véritable option dans ce coin qui grouillait de miliciens, d'autant plus que rien n'empêchait sa partenaire d'un jour de signaler le vol, et de dresser un portrait de son charmant minois. Aussi, il s'éloignait sans s'éloigner réellement, restant attentif aux personnes qui pouvaient se trouver autour d'eux, et il était certain de pouvoir gagner la joute si seulement il n'avait pas été distrait par l'uniforme rutilant d'un milicien posté au bout de la rue qui leur faisait écho. « Allez, je suis même sûre que tu as pris quelque chose de bien inu- » Tile ? Elle s'était arrêtée aussi sec en voyant le petit étui en cuir que renfermait jusque là la main d'Ariel, s'attendant probablement à voir autre chose qu'un rangement pour poignard. Soufflant, il roula des yeux, haussant de nouveau des épaules tout en se redressant. « Faut croire que se promener avec un couteau dans les poches peut vite devenir dangereux. » Il étouffa presque un rire à cette pensée, ne comptant même plus les fois où sa nourrice lui avait fait la remarque. Dire qu'il avait suivi ses conseils cette fois-ci... L'univers était décidément bien contre lui aujourd'hui. Nonobstant, il jaugea la brune, tentant de se décrire cette expression bien étrange qu'elle affichait, sans parvenir à mettre un mot dessus. Est-ce qu'elle était chamboulée à ce point ? C'est bon, ce n'était qu'un étui en cuir, il ne tenait pas non plus sa vie entre ses mains. « Tu t'attendais à autre chose on dirait. Si t'y tiens tant, je te le rends, et tant pis pour ma lame. Je trouverai bien autre chose autre part. »Sur ces mots, il tendit la main vers elle, laissant pendre le petit étui devant ses yeux. Combien de temps allait-elle attendre avant de le récupérer ? Une, deux, trois. Sa réaction ne se fit pas attendre et, d'abord hésitante, il suivit le trajet de sa main jusque l'étui de cuir, ne reprenant la parole que lorsque celle-ci fut à mi-chemin, son regard déviant vers le fond de la ruelle qui lui faisait face. « Mais tu sais.... je suis pas certain que ton père voit d'un bon oeil le fait que tu traînes avec des voleurs. » Comme il avait pu s'y attendre, elle tourna aussi vite la tête et, récupérant son dû, il recula vivement de plusieurs pas tout en étouffant son rire. Tel est pris qui croyait prendre, n'était-ce pas ce qu'on disait dans des cas pareils ? Narguant quelques secondes la jeune fille qui le fusilla du regard lorsqu'elle retourna la tête vers lui, il la coupa net alors qu'elle chercha à reprendre la parole, fourrant une main dans sa poche pour en retirer un petit objet doré. « Tiens ! » Sans prendre la peine de vraiment viser, il le lança vers elle, rangeant alors l'étui dans son autre poche. « C'est pas de l'or, mais ça vaut ce que ça vaut. Dis-toi que c'est un emprunt à long terme ! J'te revaudrai ça un jour, parole d'Ariel ! » Eclatant de rire, il profita de son attention pour détaller sans demander son reste, glissant à travers les quelques passants qui se trouvaient là pour rejoindre les ruelles qu'il affectionnait plus que ce centre trop découvert à son goût. Courir lui procurait un bien fou, encore, toujours et, tandis que ses pieds martelaient le sol à toute vitesse, il tentait de savoir s'il avait bien visé juste, et si elle allait, comme il l'espérait, garder le silence sur ce petit accrochage. Après tout, il lui avait donné son prénom, gage de confiance dans le milieu d'où il venait et, à ce stade, même si elle allait le dénoncer, il trouverait certainement un moyen d'en réchapper, comme toujours. Il se demanda même quelle tête elle avait bien pu faire, en découvrant que ce qu'il lui avait lancé n'était autre qu'une petite figurine qu'il avait lui-même taillée, dans des pierres qui bordaient la périphérie des quartiers pauvres. De valeur, elle n'en avait aucune, sauf peut-être une valeur sentimentale, à la limite. C'était juste son passe temps, récupérer quelques petites pierres de couleur plus ou moins agréable et les tailles dans des formes et d'autres. Rien à en retirer à part un petit amusement, et une collection qui s'agrandissait au fil des jours. Peut-être qu'elle la trouverait hideuse. Peut-être même qu'elle la jetterai ou qu'elle tenterait de le retrouver pour qu'il lui rende son étui. Devant ses yeux, les ruelles sombres se profilaient déjà, et avec elle ce sentiment d'apaisement, cette pensée réconfortante qui le traversait dans ces moments-là. Je rentre à la maison. Qu'importe ce qui pouvait se passer à présent, il était dans son élément, et plus rien ne pouvait l'atteindre, surtout pas une gamine du centre ville, fille de marchand ou pas. De toute façon, il était certain de ne plus jamais la revoir. Il ne s'était jamais autant trompé de toute sa vie.



I'm stuck with a valuable friend
Ariel & Soïs - 21 ans

Le ciel était couvert, laissant à peine au soleil l'occasion de transpercer les nuages de sa faible lumière. Malgré l'arrivée du printemps, le temps restait maussade, triste, perdu entre deux mondes comme s'il était incapable d'en choisir un au détriment de l'autre. Une brise rare, mais suffisante pour faire voler les quelques papiers qui traînaient dans les rues, et agiter les rideaux de tissu qui recouvraient certaines fenêtres condamnées, un vent inexistent pourtant présent, incapable à calmer dans cette accalmie ambiante. Il n'était ni tard, ni tôt et, au milieu de cette journée interminable, toute trace de vie semblait avoir quitté les bas-fonds. L'air était désolant, et un soupçon de mélancolie semblait se traîner paresseusement entre les taudits délabrés. Les ruelles paraissaient plus exigües qu'à l'ordinaire, plus sombres, plus vides, loin de l'image que s'en faisait les habitants des ruines miroitantes. Etait-ce le temps qui avait enfin raison d'elles, comme il avait eu raison de bien tant d'autres endroits avant cela ? Assis sur le toit rapiécé d'une barraque parmi dans d'autres, Ariel observait le ciel. Silencieux, il laissait son regard parcourir les étendues nuageuses, sans aucune autre compagnie que le silence mesuré qui l'enveloppait petit à petit. Le bruit des rares enfants qui jouaient à la balle, le murmure des quelques conversations emplissant les ruelles lui parvenait de bien loin et, comme le sage perché en haut de sa montagne, plus rien ne semblait avoir d'incidence sur lui. S'il pouvait passer des journées entières à courir dans les rues de butin en butin et à s'amuser à voler les bourses et l'argents de n'importe qui -ou des gens qui le méritaient, comme il se plaisait à le dire-, il était également capable de rester immobile des heures durant, occupé à observer le monde sans plus rien faire d'autre. Ne plus ouvrir la bouche, se laisser porter pas la brise matinale, et laisser son esprit divaguer sans même le forcer à penser à quoi que ce soit... Combien de fois s'était-il déjà retrouvé sur ces toits à réfléchir à tout et n'importe quoi, ou plutôt à s'obliger à ne plus réfléchir ? D'ordinaire top impatient et trop irréfléchi pour penser à ses actes, il fallait croire que le vent avait commencé à tourner lorsque Nan' était tombé malade. Voler quelques affaires pour vivre et se nourrir était une chose, trouver suffisamment d'argent pour payer des fraix médicaux en était une autre et, pris entre deux feux, Ariel se retrouvait pour une fois incapable de faire la part des choses. Le cerveau sourd, comme anesthésié par toutes ces pensées vagabondes, il n'était plus qu'une silhouette immobile perdue sous un ciel de pierre, une réalité qui lui ressemblait trop peu. Où était donc passé sa soif de vie ? Sa hargne ? Son impatience et sa vivacité ? A croire qu'il les avait laissé tomber quelque part entre les pavés des ruelles sombres, et qu'il était incapable de les récupérer pour le moment. Plus que tout, la perspective de perdre Nan' l'effrayait, autant que la pensée d'avoir un croque-mitaine sous son lit le terrorisait quand il était petit. Nan', celle qui avait toujours été là pour lui, ce petit bout de femme qui l'avait élevé, sans rien lui demander en retour, cette mère aimante même s'ils ne partageaient pas le moindre sang. Penser à son visage immobile, penser à sa peau froide, à ses paupières closes -tout cela revenait à penser à l'impensable, et à donner une chance à l'impossible de se produire. Etait-ce titiller le destin que lui donner une chance d'emprunter cette voie ? A trop y penser, il ne faisait que préparer les bases à un futur qui risquait de se produire, et sa propre impuissance le laissait aussi inutile qu'un pantin de bois sans marionnettiste. « Je t'ai rarement vu avec un air aussi sérieux... Tu réfléchis à une façon de te sortir d'un nouveau pétrin, c'est ça ? » Une voix qu'il ne connaît trop, et qui réussit à le sortir immédiatement de sa douce torpeur. Un coup d'oeil sur le côté suffit à lui confirmer la présence de cet être particulier à ses côtés et, sourire immense aux lèvres, il se releva dans la seconde, parcourant en courant les quelques pas qui les séparaient pour sauter dans les bras de son "vieil" ami. Combien de jours, combien de nuits depuis la dernière fois où ils avaient pu se parler, où ils avaient pu vagabonder ensemble dans les rues de la ville ? Ariel les avait comptés, oh que oui. De toutes les personnes qu'il connaissait, Soïs était sûrement celle dont il se sentait le plus proche. Un ami, un confident, presque un frère à ses yeux. Cette crinière indomptable, ce regard sombre et cet air bourru faisaient parti de son quotidien, au même titres que les mots francs de Ciah avaient appris à en faire parti. Soïs, cet égal, son frère de coeur aux allures d'ourson flâneur. Les voir l'un avec l'autre était une évidence aux yeux des habitants des bas-fonds et, à vrai dire, il était rare de les voir justement l'un sans l'autre - même si la donne avait commencé à changer quelques mois auparavant, au plus grand regret d'Ariel. Bras passés autour de cette silhouette qui lui avait tant manquée, il savourait leur étreinte, le visage niché contre l'épaule de son ami qui en faisait tout autant. Quelques secondes, rien que quelques secondes de plus. Une, deux, trois. Cinq tout au plus. Ou peut-être dix ? Qu'importe, Soïs était là, il était rentré, et c'est tout ce qui importait à ses yeux en ce moment présent.
Sans se départir de son sourire un brin trop franc, Ariel finit par rompre son étreinte, et recula d'un pas pour observer son compère dans sa totalité. « Je ne m'attendais pas à te voir aussi tôt ! Ni même aujourd'hui, ou... enfin... quand... » L'esprit embrouillé, la langue emmêlée, il se contentait de laisser son rire occuper le silence à sa place, et à ses lèvres le soin de choisir quels mots distiller. Semblables en bien trop de point, une seule chose savait les différencier au fond : s'ils possédaient tous deux cette soif d'aventures et de découvertes, Soïs voyait un horizon plus loin et, force détermination, rêvait de découvrir le monde, là où Ariel préférait se contenter de son terrain de jeux bersinois. Loin d'être démesurée, son ambition était pourtant à son image : indomptable et sauvage. Combien de fois lui avait-il déjà proposé de l'accompagner en dehors de la ville ? Combien de fois Ariel avait-il décliné son offre, prétextant obligations et excuses en tout genre ? Gamin immature évoluant au creux d'une ville immense à ses yeux, il n'était pas encore capable de faire preuve de suffisamment de courage pour s'émanciper au point de passer les portes de Bersinar, probablement de peur de voir la ville changée à son retour. Grandir ? Partir ? Voyager ? Des notions qui lui étaient inconnues, comme bien d'autres dont il se passait agréablement. A croire que l'orphelin sans passé tenait justement trop à ses racines... « On vient de rentrer, et permets-moi de te dire que tu as raté quelque chose ! » Un regard soutenu, des éclats de rires, et Soïs se laissa tomber sur le toit, récupérant sans tarder de sa longue traversée. Sa dernière épopée en date ? Valtameri. Lorsqu'il lui en avait parlé, Ariel n'avait pu que le regarder d'un air incompréhensible - après tout, malgré son nom, les étendues d'eau et lui, ça faisait deux, alors loin de lui l'envie d'aller lorgner près d'une ville côtière. Il avait pourtant rêvé en entendant Soïs parler de bateaux et de piraterie, d'îles perdues et de monstres marin, et quelque chose lui disait que le compte-rendu qu'il ne tarderait pas à entendre se révélerait porteur de nombreuses nouvelles histoires. A son tour, Ariel récupéra sa place de choix, s'installer à côté de son ami, le fixant d'une expression mélangeant impatience et enthousiasme - et un brin de déception également. « Tant que ça ? Alors, Valtameri, c'était comment ? Comme tu l'imaginais ? Mieux, pire, plus grand, plus petit ? Raconte-moi tout ! » Ne lui manquait plus qu'un queue touffue battant furieusement le sol, et il avait tout du chiot heureux de revoir son maître. Un imbécile, un nigaud, un simple d'esprit aux yeux de certains, qui demeurait pourtant plus sincère que bien des gens qui l'entouraient. Riant un peu plus, Soïs fouilla rapidement dans la poche de son veston, abandonnant son ami des yeux quelques instants. « Si tu es si pressé que ça d'entendre toute mon histoire, tu n'as qu'à venir avec moi la prochaine fois, ça m'évitera de toujours tout te raconter après coup ! » Ses épaules se secouèrent au rythme de son rire qui redoubla d'intensité et, enfin, il parvint à extirper un paquet enveloppé dans du papier de sa poche et le lança vers Ariel qui l'attrapa au vol. « Des agrumes chipées directement sur place. Tu vas te régaler. »Ariel étouffa à peine son rire, plongeant la main dans le paquet pour extirper un fruit qu'il attaqua directement, prenant le soin d'en lancer tout de même un à son comparse. Lui avait-il manqué ? Grand dieu oui, qu'Eliopée lui en soit témoin. Sa présence était un bienfait qu'il chérissait jour après jour, et rien n'avait plus de valeur à ses yeux que la perspective de passer une après-midi à ses côtés. Combien de temps allaient-ils pouvoir continuer de cette façon, à vivre de larcins et d'eau fraîche ? Soïs avait toujours fait partie de son passé, de son présent mais il en venait parfois à se demander s'il peuplerait toujours son futur. Dans ses moments-là, quand le doute semblait suffisamment dense pour l'assaillir de toute part, il repensait à tout ce qu'ils avaient déjà partagés. A leurs instants de bonheur et de malheurs, leurs vols, leurs courses, leurs engueulades et leurs chutes, tout ce qui avait contribué à faire d'eux ce qu'ils étaient aujourd'hui. « Et quand je te parle de venir avec moi, je suis sérieux. La vie ne s'arrête pas à Bersinar, tu sais. Il y a d'autres villes autour, d'autres gens à rencontrer. Tu ne peux pas passer ta vie cloîtré entre ces murs. » Un regard, lancé pendant une fraction de secondes, et Ariel se surprit à s'entendre ricaner, détournant les yeux comme si c'était la dernière chose qu'il puisse encore faire. Sa réaction n'échappa pas à Soïs, qui soupira théâtralement, avant de rire de leur propre bêtise. « Sincèrement, je ne vois pas ce qui t'empêche de mettre un pieds dehors. Tu n'as ni travail, ni obligation, ni même la moindre conquête. Ou alors tu me caches des choses, et je veux dès à présent que tu me mettes au courant de tout ça. » L'abruti remarqua l'oeillade loin d'être sérieuse que lui lançait Soïs seulement au moment où il relevait les yeux vers lui et, éclatant de rire, il se pencha pour lui donner un coup amical d'épaule, plus pour le faire taire que pour montrer qu'il était gêné - Soïs n'avait pas son égal pour raconter des inepties en tout genre. Marmonnant des tas de choses inaudibles, il secoua négativement la tête, refermant frénétiquement le paquet d'agrumes comme pour se donner contenance. Une conquête... N'importe quoi. Comme s'il suffisait d'une femme pour l'empêcher de voir le monde ! Soïs était bien loin de la vérité, d'une vérité que même Ariel ne savait définir. « Ne me dis pas que... J'ai visé juste, en plus ? » Faussement étonné, il ne semblait plus pouvoir s'arrêter et, plutôt que de mettre fin à sa plaisanterie, il préférait continuer sur sa lancée, embêter Ariel faisant partie de ses sports favoris après tout. Piqué au vif, le concerné se retourna immédiatement vers lui, lui lançant en pleine tête une boulette d'un papier qu'il avait attrapé peu de temps auparavant. « N'im...n'importe quoi ! J'ai d'autres choses bien plus importantes à faire que de courir après les gens ! » « Je croyais pourtant que tu passais ta vie à faire ça, courir après les gens... » Le large sourire qui lui fait face ne fait que l'énerver un peu plus. Pense-t-il sérieusement avoir visé juste ? Soupirant de nouveau, l'abruti le fixe quelques instants, avant de sourire à son tour. « Je cours, certes, mais pour voler leur argent, pas leur coeur. » Combien de temps pouvaient-ils passer encore à se renvoyer la balle, à chahuter comme les deux grands gamins qu'ils étaient, sans plus se soucier de rien d'autre ? Le temps n'avait plus d'incidence. Loin de les emmener encore dans sa course folle, il n'existait plus, ne s'écoulait plus, et leur offrait le répit auquel ils aspiraient temps. Il n'y avait plus qu'eux deux. Eux, les toits délabrés, les bas-fonds désolés, et le ciel pour les surplomber. Et cette réalité suffisait amplement à Ariel. « Promets-moi qu'un jour, on partira tous les deux visiter le monde entier. » Le silence perdait de sa saveur lorsqu'il était si souvent coupé par de telles questions, et Ariel hésita de nouveau à envoyer quelque chose vers le visage de son ami - n'ayant malheureusement plus que ses agrumes à disposition, il se ravisa, préférant les manger plutôt que de les gaspiller ainsi. Il laissa les secondes reprendre leur course, paresseusement, incapable de prononcer le moindre mot. Partir... Partir ouvrait de multiples possibilités, bien trop nombreuses à ses yeux et, même si explorer Evehnet semblait une partie de plaisir, il ne pouvait se résoudre à accompagner son compagnon. Au lieu de ça, il restait silencieux, laissant ses yeux se perdre de nouveau dans l'immensité grisâtre, comme il l'avait fait jusque là. « Ariel... » « Okay... okay. J'le promets. » Ce n'est qu'en sentant le regard appuyé de Soïs à son égard qu'il tourna légèrement la tête, rencontrant ce sourire qu'il connaissait tant. Deux frères. Deux amis, deux égaux. Une âme identique scindée entre deux deux, et une promesse qui venait de les lier de nouveau. Intérieurement, Ariel prit peur. Il prit peur d'avoir un jour à briser sa promesse et, au contraire, de l'honorer trop vite. Jamais il n'aurait cru qu'il n'aurait jamais plus l'occasion de voyager de toute sa vie.



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✜ RESTLESS (Ariel)

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